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sans cesse sur ses lèvres à propos de choses qui ne l’étaient guère… du moins, il me le semblait. Comme nous terminions le tri des chiffons, elle me dit :

— Une femme… n’importe quelle femme, doit être toujours bien tenue… Du reste, Mary, vous ferez comme je fais : c’est un point capital… Vous prendrez un bain, demain… je vous indiquerai…

Ensuite, Madame me montra sa chambre, ses armoires, ses penderies, la place de chaque chose, me mit au courant du service, avec des réflexions qui me paraissaient drôles et pas naturelles…

— Maintenant, dit-elle… Allons chez M. Xavier… vous ferez aussi le service de M. Xavier… C’est mon fils, Mary…

— Bien Madame…

La chambre de M. Xavier était située à l’autre bout du vaste appartement ; une coquette chambre, tendue de drap bleu relevé de passementeries jaunes. Aux murs, des gravures anglaises en couleur, représentant des sujets de chasse, de courses, des attelages, des châteaux. Un porte-cannes tenait le milieu d’un panneau, véritable panoplie de cannes avec un cor de chasse au milieu, flanqué de deux trompettes de mail entrecroisées… Sur la cheminée, entre beaucoup de bibelots, de boîtes de cigares, de pipes, une photographie de joli garçon, tout jeune, sans barbe encore, physionomie insolente de gommeux précoce, grâce douteuse de fille, et qui me plut.