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ment portée sur une arcature trilobée, à jour, d’une grâce et d’une légèreté infinies. L’extrémité du bas-côté septentrional, que longe une obscure venelle, est décorée d’ornementations plus touffues et moins sévères. On y remarque beaucoup de personnages singuliers, à face de démon, des animaux symboliques et des saints pareils à des truands, qui, dans les dentelles ajourées des frises, se livrent à d’étranges mimiques… Malheureusement, la plupart sont décapités et mutilés. Le temps et la pudeur vandalique des desservants ont successivement endommagé ces sculptures satiriques, joyeuses et paillardes comme un chapitre de Rabelais… La mousse pousse, morne et décente, sur ces corps de pierre effritée où, bientôt, l’œil ne saura plus distinguer que d’irrémédiables ruines. L’édifice est partagé en deux parties par de hardies et minces arcades, et ses fenêtres, rayonnantes dans la face sud, sont flamboyantes dans le collatéral nord. La maîtresse vitre du chevet, en rosace immense et rouge, flamboie et fulgure, elle aussi comme un soleil couchant d’automne.

M. le Doyen communiquait directement de sa cour, plantée de vieux marronniers, dans l’église, par une petite porte basse, récente, qui s’ouvrait sur un des collatéraux, et dont il partageait la clé unique avec la supérieure de l’hospice, sœur Angèle. Aigre, maigre, jeune encore, d’une jeunesse revêche et fanée… austère et can-