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Rose, il salue, sourit, referme son bréviaire et s’arrête :

— Ah ! c’est vous, ma chère enfant ?… Et le capitaine ?…

— Merci, monsieur le curé… ça va tout doucement… Le capitaine s’occupe à la cave…

— Tant mieux… tant mieux… J’espère qu’il a semé de belles fleurs… et que, l’année prochaine, à la Fête-Dieu, nous aurons encore un superbe reposoir ?…

— Bien sur… monsieur le curé…

— Toutes mes amitiés au capitaine, mon enfant…

— Et vous de même, monsieur le curé…

Et, en s’en allant, son bréviaire ouvert à nouveau :

— Au revoir… au revoir… Il ne faudrait dans une paroisse que des paroissiennes comme vous.

Et je rentre, un peu triste, un peu découragée, un peu haineuse, laissant cette abominable Rose jouir de son triomphe, saluée par tous, respectée de tous, grasse, heureuse, hideusement heureuse. Bientôt, je suis sûre que le curé la mettra dans une niche de son église, entre deux cierges, et nimbée d’or, comme une sainte…