Page:Mirbeau - Le Journal d’une femme de chambre.djvu/107

Cette page a été validée par deux contributeurs.

dur… la bouche mauvaise… Lui, la suit partout, tremble, balbutie des excuses…

— Mais, mignonne, tu sais bien…

— Fiche-moi la paix… Tu m’embêtes…

Le lendemain, Monsieur ne sort pas, naturellement, et Madame crie :

— Qu’est-ce que tu fais à tourner ainsi dans la maison, comme une âme en peine ?

— Mais, mignonne…

— Tu ferais bien mieux de sortir, d’aller à la chasse… le diable sait où !… Tu m’agaces… tu m’énerves… Va-t-en !…

De telle sorte qu’il ne sait jamais ce qu’il doit faire, s’il doit s’en aller ou rester, être ici ou ailleurs ! Problème difficile… Mais, comme dans les deux cas Madame crie, Monsieur a pris le parti de s’en aller le plus souvent possible. De cette façon, il ne l’entend pas crier…

Ah ! il fait vraiment pitié !


L’autre matinée, comme j’allais étendre un peu de linge sur la haie, je l’aperçus dans le jardin. Monsieur jardinait… Le vent, ayant pendant la nuit couché par terre quelques dahlias, il les rattachait à leurs tuteurs…

Très souvent, quand il ne sort pas avant le déjeuner, Monsieur jardine ; du moins, il fait semblant de s’occuper à n’importe quoi, dans ses plates-bandes… C’est toujours du temps de gagné sur les ennuis de l’intérieur… Pendant ces