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vantes mâchoires des clématites et des ronces.

— C’est le trou ? fit-elle.

— Oui !…

— Le trou sans fond ?

— Oui !…

— Ah !… C’est vrai… je me rappelle…

Et elle se tut.

Les clématites étaient défleuries. Des graines plumeuses, soyeuses, ailées avaient remplacé les fleurs ; de petits fruits noirs ornaient les sarments des ronces. Et, en face de nous, la tourbière était plus sinistre. Il me semblait que les eaux nous regardaient de mille regards bruns. Une bergeronnette vint on ne sait d’où. Elle sautilla légère, de flaque en flaque comme une pensée candide sautille parfois dans le cerveau d’un mauvais homme.

— Et l’oseraie ?… dit Marie, rompant enfin le silence. Je ne la vois pas…

— Elle est derrière le pli du coteau… Si tu veux, je te la montrerai…

— Non… non… Je demandais cela… comme j’aurais demandé autre chose… Ah ! Dieu, non… je ne veux pas la voir…

Elle était maintenant étendue sur le dos, le chapeau rabattu sur son visage, les bras allongés, les mains à plat dans l’herbe. Je me penchai vers elle :

— Marie ?… M’écoutes-tu ?…