Page:Mirbeau - La Pipe de cidre.djvu/149

Cette page a été validée par deux contributeurs.

elle n’entendit plus l’espèce de petit râle, de petit glou-glou qui sortait du nez du bonhomme ainsi que d’une bouteille qui se vide. Elle le tâta au front, à la poitrine, aux mains et le trouva froid.

— Il a passé ! dit-elle avec un attendrissement, mais avec un ton de respect grave.

Les paupières du père François s’étaient révulsées au moment de l’agonie finale et dévoilaient l’œil terne, sans regard. Elle les abaissa d’un coup de pouce rapide, puis elle considéra, songeuse, durant quelques secondes, le cadavre, et elle pensa :

— C’était un homme rangé, économe, courageux… Il s’a ben conduit toute sa vie… il a ben travaillé… J’vas lui mettre une chemise neuve, son habit de mariage… un drap bien blanc… Et puis… si le fils le veut… on pourrait lui acheter une concession de dix ans… dans le cimetière… comme un riche…