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avec ses murs blancs, ses rideaux à gaies fleurettes, son atmosphère de pureté et de paix morale. Par les fenêtres ouvertes sur le jardin, le soleil du soir entrait avec les arômes des fleurs, et, là-bas, au-dessus des coteaux qui poudroyaient dans une brume dorée, un grand ciel apaisé, un grand ciel très doux, d’un bleu nacré, faisait un fond de lumière adorable à ce drame auguste et terrible de la mort.

M. le curé s’approcha du lit, en marchant sur la pointe des pieds. Il crut voir passer une inquiétude dans les yeux du moribond, interrogativement fixés sur lui. Alors, il se pencha tout près, et il dit :

— Je ne viens pas pour ce que vous croyez… Je ne viens pas en prêtre… J’ai toujours respecté votre vie… je respecterai votre mort… Soyez tranquille, mon ami… Endormez-vous sans crainte de moi.

Puis, d’une voix un peu plus tremblante, et que l’émotion étranglait :

— Je viens en ami vous dire un dernier adieu, un dernier et fraternel adieu !…

Il prit tendrement la main du mourant qui, déjà se refroidissait, la serra avec une force délicate, et il dit encore :

— Je viens aussi vous demander si vous n’avez pas à me confier quelques recommandations particulières. Toutes vos volontés, mon