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Ma mère ne s’était pas trompée. C’étaient bien les Robin qui avaient sonné à la grille. Ils arrivèrent, lui, soufflant, sa figure enfouie dans le triple tour d’un cache-nez à carreaux noirs et blancs ; elle, minaudant sous une capeline de laine rouge, qu’ornait un large ruban de velours noir.

— Quel temps ! mes amis, s’exclama M. Robin, qui s’ébrouait ainsi qu’un vieux cheval, quel temps !… Et le daromètre daisse toujours.

Mme Robin arrondit la bouche, prit un air affectueux et navré.

— Nous nous disions, tout à l’heure, mon mari et moi, en dînant : « Pourvu que ce pauvre monsieur Dervelle n’ait pas été obligé d’aller voir des malades, par un temps pareil !… » Pauvre monsieur !… Quel dur métier… la nuit… Il fait si noir !…

— Le fait est, déclara mon père, que ça n’encourage pas, des temps comme ça !… Mais qu’est-ce que vous voulez ?… Quand il faut, il faut !… Et pas toujours sûr d’être payé, voilà le triste ! D’abord, les pauvres… ce sont les plus exigeants !

— Tardleu ! lança M. Robin… ils ne regardent toint à la détense des autres… hé ! hé ! hé !

Ma mère aidait Mme Robin à se débarrasser de sa capeline et de son manteau.

— Et votre petit Georges ? demanda-t-elle… vous ne l’avez pas encore amené ?

— D’un temps pareil, chère madame !… Et puis, il est un peu souffrant… Il tousse beaucoup… Figurez-