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la maladie. Un soir, il eut avec ma mère une dispute qui commença très bas, s’éleva peu à peu, au ton violent de la colère et de la menace. Le capitaine disait :

— Vous savez… Il faudra mettre des scellés partout !

Et ma mère, impatientée de cette phrase qui revenait à tout propos, répondait :

— Qu’est-ce que cela vous regarde ?… D’abord, pourquoi êtes-vous ici, vous ?

— Pourquoi ! nom de dieu ?… Pourquoi ?… Pour vous empêcher de voler, d’emporter les affaires chez vous.

— Moi ?… moi ?… criait ma mère… c’est vous qui fouillez dans les tiroirs !… c’est vous qui êtes un voleur… Que faites-vous ici ? vous n’êtes que son cousin !…

— Il manque de la vaisselle, de l’argenterie… Je vais prévenir le commissaire de police.

— Moi, je vous ferai jeter dehors par les gendarmes.

Il fallut que mon père vînt imposer silence au capitaine, qui se disposait à épuiser la série de ses jurons.

À mesure que l’état de mon oncle s’aggravait, le cousin Debray se faisait plus insolent, il était d’une méfiance hargneuse de garde-chiourme. Il surveillait mes parents, descendait aux plus bas espionnages, ne dissimulait point ses espérances cyniques. Toujours il grognait :

— Faudra qu’on mette les scellés, nom de Dieu !… Je suis sur le testament… Vous n’y êtes pas, vous autres… L’abbé se foutait de vous, nom de Dieu !

Il jugea même que la bibliothèque était trop éloignée