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fois par semaine, le dimanche. Et encore, plusieurs dimanches, l’attendit-on vainement ; les cloches sonnèrent et l’abbé ne parut point. Le curé Blanchard s’émut. Jugeant que la maladie n’était qu’un prétexte, puisqu’il n’avait point abandonné ses promenades quotidiennes, il s’en expliqua avec lui.

— Je fais ce qui me plaît ! déclara mon oncle, si je suis assez malade pour ne pas dire ma messe, si je ne le suis pas assez pour me promener, c’est un phénomène pathologique qui ne regarde que moi… Occupez-vous de vos vicaires…

Le curé prit un air de foudroyante autorité.

— Monsieur l’abbé ! si je vous ai laissé tranquille jusqu’ici, c’est que vous appartenez à l’une des meilleures familles du pays, une famille pieuse que j’aime, que j’estime, que je vénère.

— Eh bien ! c’est cela ! interrompit l’abbé, vénérez-la, tout à votre aise… Jouez-lui de la flûte… C’est une brave famille… Vous êtes un brave homme, je suis une canaille. C’est entendu !… Pourtant !… je possède trois mille francs de rentes, une petite maison, un grand jardin… je suis brouillé avec ma famille, je n’ai pas d’héritiers qui m’intéressent…

Il tapa sur l’épaule du curé.

— Si je vous donnais tout cela, par testament ?… Hein ! qu’en dites-vous ?

Regardant l’abbé avec des yeux troubles, où passait la lueur d’une convoitise, le curé Blanchard balbutia :