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Jules pénétra dans la cour de l’évêché… Monseigneur attend monsieur l’abbé dans son cabinet… je suis chargé de dire à monsieur l’abbé…

— C’est bien, interrompit Jules, d’un ton bref.

Il gagna sa chambre, se trempa la figure dans l’eau, changea de soutane, et se présenta chez l’évêque. Celui-ci, en effet, l’attendait.

— J’ai craint que vous ne fussiez parti, dit-il.

Et désignant un siège :

— Asseyez-vous, monsieur l’abbé.

Le vieux prélat n’était ni solennel, ni colère ; il semblait plutôt embarrassé. Après s’être retourné plusieurs fois sur son siège, il prononça d’une voix douce :

— Monsieur l’abbé… je ne veux pas de scandale dans mon diocèse… je n’en veux pas… et l’on m’a promis qu’il n’y en aurait pas… on me l’a promis formellement… De votre côté…

Il croisa ses bras, sur les accoudoirs du fauteuil, branla la tête.

— De votre côté, reprit-il, vous comprendrez que vous ne devez point, que vous ne pouvez point rester ici, après l’événement…

— Monseigneur ! balbutia Jules, profondément remué… ç’a été un moment de folie… de… de… de…

Il cherchait ses mots et ne les trouvait point. Devant ce pauvre vieux bonhomme si faible, si incapable de se défendre, si lâchement et tant de fois martyrisé par lui, Jules éprouvait une indéfinissable sensation de stupeur, de remords aigu, et d’accablante pitié. L’é-