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Le Jardinier. — Eh bien, si Mademoiselle Germaine était contente de moi… je partirais d’ici le cœur moins gros…

Il soupire. Un petit silence.

Germaine. — Il n’y a peut-être dans tout cela qu’un malentendu… Voulez-vous que je parle à mon père ?

Le Jardinier. — Merci, Mademoiselle… Ce qui est fait est fait…

Germaine. — Pourtant…

Le Jardinier. — Demain, ce serait autre chose. Il n’y a pas moyen de vivre avec Monsieur !… On se met en quatre pour lui faire plaisir, on se tue de travail pour le contenter. C’est toujours mal… D’abord, Monsieur m’a déclaré ce matin qu’il ne voulait plus de fleurs ici. Il prétend que ça attire les oiseaux et que ça prend la place des plantes utiles.

Germaine. — Ah !…

Le Jardinier. — Et puis… (Timidement) faut que je dise tout à Mademoiselle… (Résolu.) Mademoiselle sait que ma femme est enceinte !…

Germaine. — Oui… Eh bien ?

Le Jardinier. — Et qu’elle doit accoucher dans trois jours.

Germaine. — Sans doute…

Le Jardinier. — Eh ! bien, Monsieur ne veut pas d’enfants chez lui. « Pas d’enfants, pas d’enfants… qu’il m’a dit. Ça abîme les pelouses, ça