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Scène de la vie de famille.


I


À la campagne, chez M. Isidore Naturel, agronome et banquier. Étendue sur une chaise longue, empaquetée de couvertures, de châles, Mme Naturel tricote. Grosse femme impotente, figure molle et vulgaire. Assise près d’une grande baie vitrée, Germaine, un livre ouvert sur ses genoux, songe, les regards tournés au delà du parc, vers la campagne… Vingt-cinq ans, corps souple, yeux ardents, visage un peu desséché…


Mme Naturel, sans lever les yeux de son ouvrage. — Germaine !

Germaine. — Eh bien ?

Mme Naturel. — Pourquoi ne parles-tu plus ?

Germaine. — C’est sans doute que je n’ai plus rien à dire.

Mme Naturel. — Tu as assez lu.

Germaine. — Je ne lis pas.

Mme Naturel. — Alors, tu rêves ?