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Georges, si je vous apprenais le latin et le grec ?

— Il ne faut pas vous donner cette peine, répliqua ma mère en roulant des yeux humides de joie… Georges n’est pas un enfant comme les autres. Il n’apprendra jamais rien… C’est son père tout craché !

— Mais non, je vous assure, insista Monsieur Narcisse. Moi, je m’en charge. Je pourrais venir deux fois par jour… le matin, avant la classe… et après midi… Est-ce que cela vous plairait ?

— Mon Dieu !… comme vous êtes bon !… s’écria ma mère… Mais quelle charge ce serait pour vous !

— Elle me serait très douce, je vous le jure !…

— Vous êtes trop bon, Monsieur Narcisse… vous êtes… en vérité…

Ma mère ne put pas achever, tant elle était émue. Et il y avait dans ses petits yeux noirs une flamme étrange… une flamme qui me fit presque pleurer… Et, tout à coup :

— Non… non… criai-je… Je ne veux pas !…

Et je me mis à fondre en larmes… Monsieur Narcisse essaya de me calmer, et j’entendis ma mère qui disait :

— Laissez-le donc ! Monsieur Narcisse… c’est un petit sot !… Vous n’en tirerez rien !… C’est son père tout craché !… Naturellement, il ne veut rien faire pour sa famille… Il aime mieux rester