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de… à la duchesse de… à la marquise de… de venir chez moi… cela ne regarde personne… D’ailleurs, ce sont des amies, rien que des amies… il n’y a pas ça entre nous, pas ça !…

Le Reporter, sceptique et enthousiaste. — Il est bien certain que ça ne regarde personne… Aussi ne pourrait-on pas, mon cher maître, adroitement, sans citer de noms… ne pourrait-on pas démentir, par d’habiles allusions… Enfin, vous savez, je suis à votre disposition.

L’illustre Écrivain. — Nous verrons, quelque jour… Je sais que je puis compter sur vous… Je vous donnerai peut-être des notes… il faut attendre une occasion… la publication de mon prochain roman, par exemple !… Causons d’autre chose… N’aviez-vous pas quelque service à me demander ?

Le Reporter. — Justement !… Vous savez qu’il est beaucoup question de votre prochain roman ?

L’illustre Écrivain. — Vraiment ? On en parle déjà beaucoup !… Quel ennui !… J’ai tant horreur de la publicité… Être célèbre, si vous saviez comme c’est fatigant !

Le Reporter. — Oh ! mon cher maître !

L’illustre Écrivain. — Si… si… très fatigant ! On ne s’appartient plus… Ah ! que de fois j’ai envié d’être obscur… Tout ce bruit autour de mon nom m’énerve et me rend malade… Ainsi, on parle de mon roman ?… Déjà ?… Et qui donc en parle ?