Page:Mirbeau - Chez l’Illustre écrivain, 1919.djvu/118

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du succès et prête à accepter n’importe quel joli et honnête travail qu’on lui proposerait… Et voici la scène que ma voisine raconte et mime avec un esprit malicieux et souriant…

Elle arrive au couvent. Une religieuse, pas trop vieille, pas trop laide, très aimable de manières, très onctueuse de gestes, la figure molle et grasse, les lèvres humides de saintes paroles, la reçoit avec empressement, avec effusion même.

— Cette chère enfant !… lui dit-elle, quand la jeune fille eut terminé son récit… Mais c’est une joie… Mais c’est un devoir pour nous de vous soutenir, de vous défendre, de vous sauver…

Elle lui prend les mains, les caresse, les tripote dans ses mains potelées et un peu moites…

— Pauvre cher cœur !… Il y a tant d’embûches dans le monde, quand on n’est pas riche… Le diable guette si habilement, sous toutes les formes de la tentation et du péché, l’âme ignorante et candide d’une jeune fille !… Mais nous sommes là, heureusement…

Et, sans entrer dans des détails plus précis, elle s’informe :

— Avez-vous un directeur ? Êtes-vous Enfant de Marie ?… Pratiquez-vous bien vos devoirs religieux ?…

Ma voisine ruse, élude toutes ces questions qui la gênent et qui vont se multipliant et