Page:Mirbeau - Au bagne, paru dans L’Aurore, 28 avril 1899.djvu/6

Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui outrage la Vie et fait pleurer la Nature, je n’en sens pas, à mes épaules, le poids ignominieux… Et cette ignominie, je la porte joyeusement, à ma boutonnière, comme une fleur de bal !… Allons, avouez que je suis un brave militaire, et que j’ai bien travaillé ?

Et ce qu’il y a de plus effrayant, peut-être, que cette inconscience et ce cynisme de malfaiteur endurci, c’est que, même dans ce milieu hypocrite et cafard, et sans pitié, de « la Patrie française », parmi tous ces complices du mensonge et de l’iniquité, aucun ne se soit levé, n’ait arraché de l’estrade, où il se pavanait, l’insolent bourreau, et ne lui ait jeté à la face, dans un crachat, ces mots :