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expie tout cela, aujourd’hui. Cette injustice, par rapport à lui, devient une justice par rapport à toi… Tout est bien… Passe ton chemin, prolétaire, et, si le cœur t’en dit, passe en chantant…

C’est M. Guesde qui t’apporte ce généreux conseil, et M. Guesde s’y connaît. C’est un logicien implacable, à ce qu’on prétend, et il a une belle barbe. À toutes les indignités sociales qui vouent Dreyfus, sinon à ta haine — car on te permet de ne pas le haïr — du moins à ton indifférence, M. Guesde, pour un peu, eût ajouté celle-ci, que, étant juif par surcroît, Dreyfus ne saurait mériter ta pitié. Ne sondons pas trop avant les raisons de M. Guesde : elles ne sont peut-être pas très pures.