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M. Pessard

Vous avez beaucoup mangé, ce soir…

M. Sarcey

Cela me semble si drôle de ne pas être au théâtre, à cette heure ?… Ça me gêne, ça m’endort… Je n’aime pas être chez moi, le soir… Il me semble qu’il s’est passé quelque chose de très triste, ce soir !… Pourquoi avez-vous, tous, l’air triste, ce soir ?… Vous savez qu’il n’y a que les gens sans talent qui ont l’air triste !… Gandillot !

M. Gandillot

Mon cher maître !

M. Sarcey (il rit, il pouffe de rire)

Est-il impayable, ce gaillard-là !… Je me tords… Non, mais avez-vous entendu, comme il a dit : « Mon cher maître. » On n’est pas drôle comme ce garçon-là !… Gandillot !

M. Gandillot

Mon cher maître !

M. Sarcey (riant toujours)

C’est à payer sa place !… Je ne sais pas où il va trouver tout ce qu’il dit, cet animal-là ! … Ah ! le bougre ! Quelle imagination ! Quelle observation !… Quelle fantaisie dans la cocasserie !… Il me fera mourir de rire… Oh ! oh ! oh !… Voilà ce que j’appelle du talent, moi… Aussi, Gan-