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se décompose irrésistiblement,
et les voiles bleuâtres des princesses captives
vont, en spirales diluées,
se fondre avec la nuit sur de brumeuses rives…

Et le visage s’est nimbé des choses :
la coupe de jade aux laiteux reflets
sur la commode ancienne en bois de rose ;
les livres clos, rangés ainsi que des valets,
debout dans leur sobre livrée ;
l’ample bergère avec une dentelle aux manches,
et le cristal de ce vase élancé,
et cette gerbe de tulipes blanches…

Soir pareil aux Soirs de jadis ! Soir brouillé,
lourd de fantômes éveillés,
parfums, échos, vains rires tendres…
Pareil et dissemblable, et si brouillé de cendres !
L’horloge au tic tac monotone a sonné ;
la lampe s’éteint par degrés — rose lune
sous son frêle abat-jour nocturne,
et le conte s’achève avant que d’être né…

Et les choses retournent dans l’incertitude,
et je demeure seule avec ma solitude.