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LE VOYAGE AU BORD DE L’EAU

Un tiède soir… Un ciel sans nue et sans repli.
De dociles roseaux qu’un souffle à peine frôle…
Des brumes qu’une fée attache à son épaule…
Une sérénité de silence et d’oubli…
Une onde paresseuse et les langueurs d’un saule.

Je suis des yeux cette eau dont le ruban glacé
semble, à travers les prés, une couleuvre lente ;
cette fluidité magique, transparente,
où l’heure en déclinant a pour moi nuancé
de vains reflets d’argent, d’azur et d’amarante…

Et mon rêve, guidé par le fil du courant
s’éloigne… et puis s’éloigne encore… Je suppose
par-delà l’horizon teinté d’un peu de rose
les chemins fabuleux, les beaux chemins que prend
toute source limpide en ses deux rives close.

Je suppose à loisir l’étrangeté des ciels,
les nocturnes soleils nimbés de sortilège,
et les mornes sapins enveloppés de neige
qui se mirent, figés et comme artificiels,
dans la virginité des ondes de Norvège…