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le voyage terrestre en vous s’est déroulé
plein de jeux imprévus, de changeantes images ;
l’insidieux Ulysse et les dévots rois Mages
n’ont point, en ces temps-là, croisé plus de visages…
Et n’avez-vous, mes yeux, découvert les clartés
de la chair périssable aux promptes déchéances,
la gamme des couleurs, la ruse des nuances,
et la forme adorable, et le trait ingénu ?
Errantes visions que rien n’a fatiguées,
caravanes d’amour au seuil d’une mosquée,
colonne solitaire et droite — marbre nu !

Atalante fuyait, fuyait… J’ai reconnu
la trace de ses pas sur le sable indiquée…

Que je crains désormais les destins accomplis,
ces doigts qui fermeront sur vous mes deux paupières,
cet horrible néant, ce froid, ces lourdes pierres
retombant sur un gouffre et scellant des oublis !
Que je crains désormais l’inexorable lit
de cette Mort vouant aux ombres éternelles
l’éclat passionné des humaines prunelles !

Cependant tout cela, mes yeux, mes sombres yeux,
tout cela qui renaît d’une suprême vie