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« Crains l’Amour éloquent, beau prometteur de joies,
« l’Amour aux jeux divins dont s’anime ta joue,
« mais dont l’aube est un lac perfide où l’on se noie,
« mais dont le souvenir continue et bafoue !

« Préfère-moi. Préfère aux grands périls des choses
« mes étranges lueurs et mes ombres fidèles.
« Nous prendrons des chemins jonchés de pâles roses,
« je fleurirai ton sein de chastes asphodèles ;

« tu me suivras le long des longs espaces calmes,
« jusqu’aux fleuves d’oubli que franchissent les Ombres,
« et nous voyagerons à l’abri de mes palmes
« sous des astres nouveaux, sous des lunes sans nombre ;

« puis j’ouvrirai pour toi la retraite éternelle !
« Ombre, des superflus à jamais dépouillée,
« Ombre, tu connaîtras si ma demeure est belle
« que baigne le Léthé sous ces lunes brouillées ;

« tu verras des jardins où nul vent ne balance
« mes cyprès nébuleux et mes hauts lys de gloire,
« et tu t’allongeras sur des lits de silence,
« et tes rêves sereins n’auront plus de mémoire… »