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EROTIKA BIBLION

conformité androgyne, elles ont su la rendre précieuse. Lucien, dans un de ses dialogues, instruit deux courtisanes, dont l’une dit à l’autre : « J’ai tout ce qu’il faut pour contenter tes désirs ; » à quoi celle-ci répond : « Tu es donc hermaphrodite[1] ? » Saint Paul reproche ce vice aux femmes romaines[2]. On a peine à croire ce qu’on lit dans Athénée sur les excès de ce genre commis par ces femmes[3]. Aristophane, Plaute, Phèdre, Ovide, Martial, Tertullien et Clément d’Alexandrie, les ont désignées d’une manière plus ou moins directe, et Sénèque les accable d’une effroyable imprécation[4].

Les hermaphrodites parfaits sont à présent très-rares ; ainsi il paraît que la nature ne produit plus de ces hommes androgynes ; mais il faut convenir que l’on remarque fréquemment des effets de ces dédoublements que nous venons d’expliquer ; de tout temps et dans l’antiquité la plus reculée, comme dans les siècles plus voisins de nos jours, on a vu la passion la plus décidée de femme à femme. Lycurgue, ce sévère Lycurgue, qui rêva des choses si bizarres et si sublimes, faisait représenter publiquement des jeux qu’on appelait gymnopédies, où les jeunes filles paraissaient nues ; les danses, les attitudes, les approches, les enlacements les plus lascifs, leur étaient enseignés. La loi punissait de mort les hommes qui auraient été assez téméraires pour les approcher. Ces filles habitaient entre elles jusqu’à ce qu’elles se mariassent ; le but du législateur

  1. Dialog. meret. V.
  2. Ad Rom., cap. I, v. 26.
  3. Liv. IV, cap. XVI.
  4. « Dii illas deæque male perdant ! Adeo perversum commentæ genus impudicitiæ ! Viros ineunt. » (Epist. XCV.)