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EROTIKA BIBLION

la proie, si une institution universelle et publique ne les soumet pas à une éducation active, qui soit un foyer continuel d’émulation et une digue contre ce qui, dans les richesses et leur jouissance, et leur abus, tend sans cesse à énerver. Les sentiments énergiques et généreux germent rarement dans des corps affaiblis, et l’âme d’un Spartiate serait bien mal logée dans le corps d’un Sybarite. Aussi tous les peuples féconds en héros ont été ceux dont l’éducation martiale, les institutions fortes, la gymnastique perfectionnée et dirigée selon les vues politiques du gouvernement, aiguisaient l’émulation et la vigueur.

Ces institutions précieuses sont presque oubliées aujourd’hui. À Paris, par exemple, il y a bien quarante mille filles enregistrées à la police pour éduquer la jeunesse ; mais il n’y a pas dans cette immense capitale une seule bonne académie où l’on puisse apprendre à monter à cheval ; aucun exercice, si ce n’est l’escrime, la danse et la paume, n’y sont pratiqués, et nous avons su rendre ceux-là assez nuisibles. Il suit de là et de bien d’autres causes, que je ne prétends point énumérer, que nos passions, ou plutôt nos désirs et nos goûts (car nous n’avons guères de passions), l’emportent, et de beaucoup, sur toute vertu morale.

Parmi ces désirs, le plus violent sans doute est celui qui porte un sexe vers l’autre. Cet appétit nous est commun avec tout ce qui est crée, animé ou non animé. La nature a veillé en mère tendre et prévoyante à la conservation de tout ce qui existe. Mais il est arrivé parmi les hommes, ces êtres par excellence, qui le plus souvent ne paraissent doués d’intelligence que pour en abuser, ce qu’on n’a jamais remarqué parmi les autres animaux : c’est de tromper la nature, en jouis-