Page:Mirabeau l'aîné - Erotika Biblion, 1867.djvu/215

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
193
BÉHÉMAH

par le Saint-Esprit, dont la témérité des hommes abuse quelquefois, en interprétant malignement les passages qui sont hors de leur portée. Quoi qu’il en soit, leurs brillants sophismes ne porteront jamais la conviction dans l’âme de personne, et quand on ne verrait sur la terre que l’injustice et le crime triompher de la justice et de la vertu, cet immense désir que l’homme éprouve continuellement de toujours exister, donnerait seul la plus grande preuve de l’immortalité de notre âme, et il faudrait malgré soi dire avec Delille[1] :

  Vers une autre félicité
  Mon âme ardente étend ses ailes ;
Et rien ne peut calmer, dans les choses mortelles,
Cette indomptable soif de l’immortalité.


Page 102. — « Faunes suffoquants, Fauni sicarii. »

Saint Jérôme, dans son Commentaire sur Jérémie, ch. 50, v. 39, donne aux faunes l’épithète de ficarii, qui avaient des figues. Il faut conjecturer que, par ce mot, ce Père de l’Église a voulu dépeindre la laideur de ces faunes, dont le visage était couvert de pustules et de boutons ; ce qui n’est pas sans apparence de vérité, car ficus, figue, figurément pris, désigne une tumeur, une sorte d’ulcère qui ressemble à ce fruit.

Mais, n’en déplaise à saint Jérôme, le texte hébreu porte Im, qui signifie proprement un spectre, une chose qui inspire la terreur, d’où dérive le mot hébreu Eima, qui veut dire épouvante. Et comme on représentait les faunes et les satyres, moitié hommes et moitié boucs, fort velus, violant femmes et filles, dont ils étaient la terreur ; que, d’un autre côté, nul animal de sa nature n’est plus enclin à la lasciveté que le bouc, il est permis de croire que l’opinion de Berruyer, qui rend ses faunes très-actifs, sica-

  1. Dithyrambe sur l’immortalité de l’âme.