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NOTES SUR

nir les victimes des plus forts ; nous verrons les hommes, ces prétendus favoris de la Providence, livrés partout à des tyrans farouches, à des prêtres imposteurs et sanguinaires ; nous les verrons voués à l’infortune, vivre les jouets constants de l’affliction et de la douleur, et mourir ensuite dans les tourments pour servir de pâture à de vils insectes[1]. »

« Pour justifier la Divinité, les Déicoles ont imaginé une vie future, où, selon eux, l’homme jouira d’une félicité pure et inaltérable. »

« Mais d’abord, si quelque chose est démontré, c’est l’impossibilité de cette vie future. En effet, si l’homme ne sent que par le moyen de ses organes, n’est-il pas évident que la structure organique une fois détruite, l’homme doit rentrer nécessairement dans cet état d’insensibilité où il était avant de naître[2] ? »

« Je demande ensuite à ceux qui pensent que Dieu nous dédommagera dans une autre vie des maux que nous souffrons dans celle-ci, sur quoi ils fondent leurs espérances ? Si la sagesse, la bonté de leur Dieu se dément si souvent dans ce monde, qui pourra les assurer que sa conduite cessera un jour d’être la même à l’égard des hommes, qui éprouvent sur la terre tantôt ses bienfaits, tantôt ses disgrâces ? Si Dieu n’a pas voulu rendre ses créatures complètement heureuses dans ce monde, quelle raison ont-ils de croire qu’il le voudra dans un autre[3] ? »

Mais ces frondeurs orgueilleusement incrédules oublient que les livres fondamentaux des chrétiens ont été inspirés

  1. Homo natus de muliere, brevi tempore vivens, repletur miseriis multis, sicut et flos nascitur et moritur. Job, cap. XIV, v. 1 et 2.
  2. Mors est non esse ; id quale sit jam scio, hoc erit post me quod ante me fuit. — Mors omnium dolorum et solutio et finis : ultra quam mala nostra non exeunt, quæ nos in illam tranquillitatem, in quâ antequam nasceremur, jacuimus, reponit. Senec.
  3. De la Nature et de ses lois, par Peyrard, V. O. N. S. P. 4me édit., Paris, chez Louis, libraire, an 2 de la république.