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LE KADÉSCH

Allez à la chapelle Sixtine, aux deux grands jours de la semaine sainte, entendre ces admirables accords de voix choisies, cette sublime et céleste harmonie qui vous transporte, qui vous ravit, mais dont les sons divins cessent à l’instant de vibrer dans l’âme de tout être sensible qui les entend, et n’y laissent plus qu’une pénible impression, alors qu’on pense que ces voix si claires, si argentines, si mélodieuses, sont obtenues aux dépens de la postérité. Quel scandale odieux ! il révolte la nature.

Mais la magie d’une belle voix est-elle donc si puissante, et le chant possède-t-il une toute autre vertu que la simple prière ? On le croirait, puisque les sons de la musique délicieuse qui, dans la chapelle Sixtine, enchantent l’oreille de mille amateurs, après avoir cessé, continuent à vibrer encore dans leurs âmes, tandis que les prières et les plaintes que profère le prophète en récitant le sublime Miserere, ne les touchent nullement. Et voilà pourquoi, sans doute, pour apaiser la Divinité, on chante toujours à l’Église et à l’Opéra.