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LA TROPOÏDE

buveurs. Ce nom dérive du grec βαχκεύω, qui signifie hurler, parce qu’on avait la coutume de célébrer ses fêtes par des clameurs et des hurlements. Les Égyptiens le désignaient sous le nom de Bacha, qui veut dire crier, et ils l’honoraient sous celui d’Osiris. Les Indiens lui donnaient le nom de Dionysius ; les Arabes, celui d’Adonœus, et les Lucaniens le nommaient Pantheus. Parmi les différents noms donnés à ce Dieu, il faut remarquer celui de Nyctelius, du grec νυκτελέω, faire des sacrifices pendant la nuit, à cause que ses mystères se célébraient la nuit, à la clarté des flambeaux. Les Latins le nommaient ordinairement Liber, ce qui répond au Lyœus des Grecs, formé de λύω je délie, parce que rien n’inspire plus de licence dans les propos ni ne dissipe plus le chagrin que l’ivresse. Les Grecs le désignaient souvent sous le nom de ώμησἢ Δίονυσος, cruel Bacchus, ainsi appelé parce qu’anciennement on lui sacrifiait des victimes humaines, et que l’ivresse rend presque toujours furieux et cruel celui qui s’y laisse entraîner.

Des savants prétendent que Bacchus est le Nemrod dont parle la Genèse, ch. X, v. 8 ; car en hébreu, Nemrod est appelé Bar Chus, qui veut dire fils de Chus. Ce Dieu portait aussi le nom de Janus, mot tiré de l’hébreu Jajin, qui signifie vin, et serait ainsi, d’après l’opinion de quelques auteurs, le Noé de l’Écriture, qui planta et cultiva la vigne et qui s’enivra du jus qu’il en récoltait : « Plantavit vineam, bibensque vinum inebriatus est, et nudatus in tabernaculo suo[1]. »

Voici le rapprochement ingénieux de Bacchus à Moïse, qu’établissent Vossius, le P. Thomassin et M. Huet.

« Bacchus et Moïse naquirent en Égypte : le premier eut deux mères, Jupiter et Sémélé, et l’autre en eut deux aussi, l’une qui l’enfanta et la fille de Pharaon qui l’adopta.

  1. Gen., ch, IX, v. 20, 21, 22.