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NOTES SUR

dilles qu’avaient commises ces fils, et pour les punir, voici ce qu’il imagina. Il engage son peuple, qu’il aime tant, dans une terrible bataille, où, vainqueurs par ses ordres, les Philistins passent au fil de l’épée 30 000 Juifs qui n’avaient couché avec personne, prennent l’arche d’alliance et tuent les deux fils d’Heli, pour apprendre aux autres, sans doute, qu’il est dangereux d’interpréter trop littéralement le précepte divin : « Croissez et multipliez. »

Mais voyez cet enchaînement de justice divine : après ce bel exploit, marqué au coin de l’humanité, et les corrections toutes paternelles qu’il vient d’administrer à son peuple chéri, ne voilà-t-il pas que ce Dieu, si drôle dans ses lubies, cherche maintenant une querelle d’Allemand à ces pauvres Philistins, qu’il déteste, parce qu’ils retiennent son arche, qu’il n’a pas daigné défendre lui-même au jour du péril, et les punit d’affreuses hémorrhoïdes, dont il frappe les parties les plus secrètes et les plus honteuses de leurs corps, et leur fait ainsi pourrir le derrière !!!… « Percutiebantur in secretiori parte natium[1]. »

Grande était certes la consternation de ces idolâtres ! Mais que font-ils, pensez-vous, pour se délivrer de cette horrible maladie ?… Ils assemblent tout bonnement leurs prêtres et leurs prophètes, et, selon le conseil de ces devins, ils entrent en composition avec le Père éternel, qui, moyennant le renvoi de sa boîte carrée et d’un cadeau de cinq anus d’or, apaise son courroux et les délivre de ce fléau. « Hi sunt autem ani aurei, quos reddiderunt Philistiim pro delicto, Domino : Azotus unum, Gaza unum, Ascalon unum, Geth unum, Accaron unum[2]. »

Grâce aux progrès des sciences et à l’habileté de nos médecins, nous sommes dispensés, si pareil accident nous afflige, de recourir à ce coûteux, mais efficace moyen,

  1. Rois, liv. I, ch. 5, v. 12.
  2. Ibid., liv. I, ch. 6, v 17.