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LA LINGUANMANIE

très-souvent les sens ne suffisent point, et ceux-ci sont autant au moins aidés par celle-là, que l’imagination peut jamais l’être par le tempérament le plus vif, le plus ardent, par les sens les mieux disposés, les mieux servis de l’âge et des circonstances.

Ensuite, comme c’est le propre de toutes les passions de l’âme de devenir plus violentes, en raison de la résistance, et que la nymphomanie n’est pas facile à contenter, elle finit par être insatiable. Les femmes qui en sont atteintes ne gardent plus aucune mesure ; et ce sexe, si bien fait pour une molle résistance, pour étaler tous les charmes de la timide pudeur, déshonore, dans cette affreuse maladie, ses attraits par les plus sales prostitutions ; il demande, il recherche, il attaque ; les désirs s’irritent par ce qui semblerait devoir suffire pour les assouvir, et qui suffirait en effet si le simple prurit de la vulve sollicitait le plaisir. Mais quand le foyer du désir est le cerveau, il s’accroît sans cesse ; et Messaline, plutôt lassée que rassasiée[1], court sans relâche après le plaisir et l’amour, qui la fuient avec horreur.

Il faut en convenir cependant, l’observation nous offre en ce genre quelques phénomènes qui semblent le simple ouvrage de la nature. M. de Buffon a vu une jeune fille de douze ans, très-brune, d’un teint vif et très-coloré, de petite taille, mais assez grasse, déjà formée et ornée d’une jolie gorge, qui faisait les actions

  1. Et resupina jacens multorum absorbuit ictus.
    Mox, lenone suas jam dimittente puellas,
    Tristis abit : sed, quod potuit, tamen ultima cellam
    Clausit, adhuc ardens rigidæ tentigine vulvæ,
    Et lassata viris, sed non satiata, recessit.

    Juv., lib. II, sat. 6.