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EROTIKA BIBLION

des nuances plus ou moins fortes des mêmes sensations. La lubricité, la lasciveté, par exemple, sont des aptitudes purement naturelles au plaisir, car plusieurs espèces d’animaux sont lascifs et lubriques, mais il n’en est point d’impudiques. L’impudicité est une qualité inhérente à la nature raisonnable, et non pas une propension naturelle, comme la lubricité. L’impudicité est dans les yeux, dans la contenance, dans les gestes, dans les discours ; elle annonce un tempérament très-violent, sans en être la preuve bien certaine, mais elle promet beaucoup de plaisir dans la jouissance, et tient sa promesse, parce que l’imagination est le véritable foyer de la jouissance, que l’homme a variée, prolongée, étendue par l’étude et le raffinement des plaisirs.

Mais enfin ces dénominations et toutes les autres de cette espèce ne sont autre chose qu’un appétit violent qui porte à jouir sans mesure, à chercher sans cette retenue, peut-être plus naturelle qu’on ne croit, mais, dans sa plus grande partie, d’institution humaine, à chercher, dis-je, sans cette retenue que nous appelons pudeur, les moyens les plus variés, les plus industrieux, les plus sûrs de se satisfaire, d’éteindre des feux qui dévorent, mais dont la chaleur est si séduisante, qu’on les provoque après les avoir éteints.

Cet état tient purement à la nature et à notre constitution. C’est la faim, le sentiment du besoin de prendre sa nourriture, lequel, par excès de sensualité, produit la gourmandise, et, par la privation trop longue des moyens de se satisfaire, dégénère en rage. Le désir de la jouissance, qui est un besoin tout aussi naturel, quoique moins fréquent et plus ou moins impérieux, selon la diversité des tempéraments, se porte quelquefois jusqu’à la manie, jusqu’aux plus grands