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BÉHÉMAH

elle réside ; mais les nuances de ses dégradations peuvent être infiniment curieuses, et c’est le seul chapitre de son histoire qui paraisse nous être abordable.

Il serait infiniment téméraire de décider que les brutes ne pensent point, bien que le corps ait, indépendamment de ce qu’on appelle l’âme, le principe de la vie et du mouvement. L’homme lui-même est souvent machine : un danseur fait les mouvements les plus variés, les plus ordonnés dans leur ensemble, d’une manière très-exacte, sans donner la moindre attention à chacun de ces mouvements en particulier. Le musicien exécuteur est à peu près de même ; l’acte de la volonté n’intervient que pour déterminer le choix de tel ou tel air. Le branle donné aux esprits animaux, le reste s’exécute sans qu’il y pense ; les gens distraits, les somnambules sont souvent dans un véritable état d’automates. Les mouvements qui tendent à conserver notre équilibre sont ordinairement très-involontaires ; les goûts et les antipathies précèdent dans les enfants le discernement. L’effet des impressions du dehors sur nos passions, sans le secours d’aucune pensée, par la seule correspondance merveilleuse des nerfs et des muscles, n’est-il pas très-indépendant de nous ? Et ces émotions toutes corporelles répandent cependant un caractère très-marqué sur la physionomie, qui a une sympathie toute particulière avec l’âme.

Les animaux, considérés dans un simple point de vue mécanique, fourniraient donc déjà un grand nombre de solutions à ceux qui leur refusent le don de la pensée ; et il ne serait pas très-difficile de prouver qu’une grande partie de leurs opérations, même les plus étonnantes, ne la nécessitent pas. Mais comment concevoir que de simples automates s’entendent, agissent de con-