Page:Mirabeau l'aîné - Erotika Biblion, 1867.djvu/112

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
90
EROTIKA BIBLION

et aux goûts dépravés des hommes. Autrefois, tous les garçons de la Géorgie se vendaient aux Grecs, et les filles garnissaient les sérails. On comprend que l’on trouvait dans ce beau climat autant de Ganymèdes que de Vénus ; et si quelque chose pouvait excuser cette passion aux yeux de qui ne l’a pas, ce serait sans doute l’incomparable beauté de ces modèles.

On comprend aujourd’hui, comme on sait, par le mot de péché contre nature, tout ce qui a rapport à la non propagation de l’espèce, et cela n’est ni juste, ni bien vu. La sodomie, dans son rapport avec la ville de l’Écriture, est bien différente, par exemple, d’une simple pollution. Quoique ce goût bizarre, que l’on a compris avec tant d’autres dans le mot général mollities, ait été généralement répandu dans les pays les plus policés, l’histoire ne cite rien d’aussi fort que ce qui est rapporté dans l’Écriture. Toutes les villes de la Pentapole en étaient tellement infectées, qu’aucun étranger n’y pouvait paraître qu’il ne fût en proie à leurs désirs. Les deux anges qui vinrent visiter Loth furent à l’instant assaillis par une multitude de peuple[1]. En vain Loth leur prostitua ses deux filles, ce singulier acte de vertu hospitalière ne lui réussit pas ; il fallait aux Sodomistes des derrières mâles[2] ; et les anges n’échappèrent que grâce à cet aveuglement

  1. Gen., XIX, 4. Avant que les anges se fussent couchés, le peuple accourut, depuis les vieillards jusqu’aux enfants,.. 5… « Ut cognoscamus eos. »
  2. Les Sodomistes pensaient apparemment comme un grand seigneur moderne. Un valet de chambre de confiance lui fit observer que du côté qu’il préférait, ses maîtresses étaient conformées comme ses ganymèdes, qu’on ne pouvait trouver au poids de l’or ; qu’il pourrait… des femmes. « Des femmes ! s’écria le maître ; eh ! c’est comme si tu me servais un gigot sans manche ! »