fois, le voisinage étant habité par des amis de ma tante. Un jour que le père en Dieu était à la maison, il nous prit fantaisie d’aller nous promener, ma sœur et moi (c’est ainsi que je nommais Faustine) ; la fontaine de Vaucluse était l’objet de notre curiosité, et nous dîmes à ma tante que nous reviendrions coucher à moitié chemin, chez une vieille parente qu’elle aimait beaucoup. Nous nous arrêtâmes dans un cabaret, à deux lieues de la route, pour déjeuner. Pendant qu’on le préparait, l’idée me prit de troquer d’habits avec Faustine, qui m’avait paru la veille charmante en abbé.
— Volontiers, si cela t’amuse, mon frère, me dit-elle ; mais je n’ai point ici ma femme de chambre, comment ferons-nous ?
— Bel embarras, je t’en servirai.
— Oui, mais la décence !
— Qui est-ce qui le saura ? tu ne te méfies pas de moi ?
— Non, sans doute ; mais cependant je ne voudrais pas que tu visses tout à fait…
— Comme tu es faite, n’est-ce pas ? va, je m’en doute.
— Je le crois bien ; mais…
— Tu te doutes bien comme je suis.
— J’en ai quelques idées, mais point de certitude.
— Et qui nous empêche de satisfaire notre curiosité ?
— Mais maman…
— Crois-tu qu’elle se gêne avec le révérend père Cazzoni !