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C’est la misère, le besoin et ses lancinantes morsures, qui poussent la femme à délaisser son ménage pour aller s’enfermer d’horribles heures dans ces infernales manufactures où l’air est vicié, l’atmosphère étouffante et brûlante. Elle pleure, la pauvre mère ; elle gémit, la triste épouse, d’abandonner ainsi son bonheur et sa joie, et de venir donner sa force et sa vie à ceux qui prennent son sang, alors que pendant ce temps son foyer se refroidit et s’éteint. Et vous admettez que si l’aisance était à la maison, elle la quitterait pour gagner quelques douloureuses pièces de cuivre de plus ? Allons donc ! Vous-même ne le croyez pas.

Vous le voyez, votre raisonnement pèche par la base, et la base, ne reposant que sur une argutie et n’étant que fragilité, tout s’écroule à la fois avec elle. Je ne dirai pas que vous avez laissé cette pensée dans l’oubli pour perpétuer la domination masculine, mais c’est tout au moins un regrettable lapsus de votre argumentation.

Certes, en améliorant le sort du travailleur, vous arrivez déjà à faire faire un grand pas à la question qui nous préoccupe ; mais c’est bien loin d’être assez encore, il faut aussi songer aux travailleuses.

On a souvent demandé quel travail devait être plus spécialement affecté aux femmes, et quel incombait aux hommes.

En toutes choses, messieurs, cherchons la nature et suivons ses lois, ce sont les meilleures, les plus sages et les plus belles qu’il soit.

La nature dit que la femme possède la délicatesse, la grâce, la finesse, l’élégance et l’esprit de détail. Donnons-lui donc à faire des travaux qui aient besoin de tout ou de partie de ces dispositions. Que la femme soit et devienne artiste en toutes choses, là est son avenir, là est son milieu naturel dans lequel elle pourra donner libre essor à son imagination, à ses qualités constitutives, et c’est là seulement qu’il lui sera possible d’atteindre au bien. Que lui im-