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Et les filles, les veuves, les femmes ayant de mauvais maris, ou abandonnées par eux, — cela arrive parfois, — qu’en ferez-vous ? qui donc prendra soin d’elles, si la femme est fatalement condamnée à l’inaction ?

Oh ! je le sais, vous allez me répondre : La société sera là ; la société s’occupera d’elles : la société pour les jeunes filles, la société pour les veuves, la société pour les femmes mal mariées, encore et toujours la société ! Et permettez-moi de vous le dire, messieurs, cette tendance de la société à absorber l’individu me paraît néfaste au plus haut point pour l’avenir. L’affirmation du génie humain est la personnalité, la raison de son progrès c’est son libre arbitre, sa responsabilité distincte ; l’absorption de l’individu dans la société paralysera l’énergie et éteindra toute initiative, le plus puissant levier du progrès, le levain du mieux en toute chose. Et je m’affligerais grandement de la vie de la société nouvelle, si elle avait pour résultat l’anéantissement de l’individualité.

Mais laissons ces abstraites questions d’avenir.

Vous, époux, vous voulez garder vos femmes auprès de vous ; c’est au mieux, mais elles peuvent travailler encore dans leurs maisons, même en élevant leurs enfants ; et tout au moins n’empêchez pas celles qui ne sont pas mères de vivre honorablement par leur travail, afin d’être libres et respectées

Élever ses enfants, en faire des hommes, donner à la société des citoyens sains, virils, forts et moraux, c’est une grande tâche pour les femmes, un noble devoir à accomplir, mais ce n’est pas là tout encore ; il leur faut aussi aider suivant leur possibilité à la marche progressive de l’humanité.

Puis parfois, bien souvent même, la femme non-seulement n’est pas soutenue par son mari, mais encore elle fait vivre, — et au prix de quel travail,