Page:Milton - Le Paradis perdu, trad. de Chateaubriand, Renault et Cie, 1861.djvu/177

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cer la circonférence de cet univers et de toutes les choses créées. Une pointe de ce compas il appuie au centre, et tourne l’autre dans la vaste et obscure profondeur, et il dit :

« — Jusque-là étends-toi, jusque-là vont tes limites ; que ceci soit ton exacte circonférence, ô monde ! » —

« Ainsi Dieu créa le ciel, ainsi il créa la terre ; matière informe et vide. De profondes ténèbres couvraient l’abîme : mais sur le calme des eaux l’Esprit de Dieu étendit ses ailes paternelles, et infusa la vertu vitale et la chaleur vitale à travers la masse fluide ; mais il précipita en bas la lie noire, tartaréenne, froide, infernale, opposée à la vie. Alors il réunit, alors il engloba les choses semblables avec les choses semblables ; il répartit le reste en plusieurs places, et étendit l’air entre les objets : la terre, d’elle-même balancée, sur son centre posa.

« — Que la lumière soit » ! dit Dieu. —

« Soudain la lumière éthérée, première des choses, quintessence pure, jaillit de l’abîme, et partie de son orient natal, elle commença à voyager à travers l’obscurité aérienne, enfermée dans un nuage sphérique rayonnant, car le soleil n’était pas encore : dans ce nuageux tabernacle elle séjourna quelque temps.

« Dieu vit que la lumière était bonne, et il sépara la lumière des ténèbres par hémisphère : il donna à la lumière le nom de jour, et aux ténèbres le nom de nuit. Et du soir et du matin se fit le premier jour. Il ne passa pas sans être célébré, ce jour, sans être chanté par les chœurs célestes, lorsqu’ils virent l’orient pour la première fois exhalant la lumière des ténèbres ; jour de naissance du ciel et de la terre. Ils remplirent de cris de joie et d’acclamations l’orbe universel ! ils touchèrent leurs harpes d’or, glorifiant par des hymnes Dieu et ses œuvres : ils le chantèrent Créateur quand le premier soir fut, et quand fut le premier matin.

« Dieu dit derechef :

« — Que le firmament soit au milieu des eaux, et qu’il sépare les eaux d’avec les eaux. » —