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colonie reculée dans un coin du globe n’a pour ainsi dire pas de communication avec le reste du monde. Ses seules relations sont avec le jeune État de Minnesota au moyen de ce bateau à vapeur qui, l’été, navigue sur la Rivière Rouge, et avec l’Angleterre au moyen du vaisseau de la Compagnie, qui vient une fois l’an apporter des denrées à la factorerie d’Yorck, située à l’embouchure du Nelson dans la baie de Hudson. Il en résulte que les fermiers ne trouvent pas de marché pour l’écoulement de leurs produits[1].

La Compagnie croit de son intérêt de s’opposer à l’immigration et de conserver au pays le caractère d’une vaste réserve pour les animaux à fourrure. La colonie ne s’est donc guère jusqu’ici recrutée qu’au moyen des serviteurs de la Compagnie qui, lorsqu’ils prennent leur retraite, viennent s’établir à Fort-Garry. Un autre point de la politique de la Compagnie est de décourager tout autre commerce que celui qui se fait par son entremise. En 1849, voulant faire respecter son monopole au sujet du commerce des fourrures, elle a emprisonné quatre métis qui, au mépris de ses lois, avaient acheté des fourrures aux Indiens. Les métis prirent les armes et une révolution devint imminente. La Compagnie dut renoncer à son procès ; et, jusqu’ici, elle s’est contentée d’empêcher, autant qu’elle l’a pu, le commerce libre, en excommuniant ceux qui s’en sont rendus coupables, c’est-à-dire en refusant de leur procurer aucune des denrées dont on se fournit dans ses magasins. Cette politique compressive, oppressive, excite continuellement le mécontentement de la population indépendante, qui, non sans motif, a peu de foi dans l’équité des lois promu1guées par la Compagnie, fort vraisemblablement avec l’intention de garantir ses intérêts plutôt que de favoriser le bien général. C’est le Gouverneur qui nomme les membres

  1. Comparer cette description de la colonie de la Rivière Rouge et l’appréciation de ses habitants avec celles qu’on trouve dans le Tour du Monde, 1er semestre de 1860, p. 282 et suiv. (Trad.)