Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/172

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à leur approvisionnement. Il est rare que le bison se tienne à distance du fort Pitt et souvent il arrive, quand la disette règne à Carlton et à Edmonton, que les gens du Petit Fort[1], comme on l’appelle, se régalent de viande fraîche tous les jours.

On y cultive la terre d’une façon primitive, il est vrai, mais qui donne d’abondants produits. On y récolte des pommes de terre en grande quantité et d’une grosseur immense, les carottes et les navets y prospèrent également, et l’on ferait ici certainement autant de blé qu’à la Rivière Rouge ou à Edmonton, si l’on ne manquait pas de marché pour le vendre.

Nous passâmes plusieurs jours à nous mêler aux Indiens campés à l’entour, ou à leur acheter quelques chevaux. Cheadle ne manquait pas d’occupations, car l’arrivée d’un médecin blanc dans ces pays est un événement si rare que chacun saisit l’occasion de réclamer son assistance et ses conseils. On attendait de lui non-seulement la guérison des maladies présentes, et la prophétie de celles qui pouvaient avoir lieu, mais aussi l’analyse rétrospective des moyens qui auraient pu être pris dans des cas depuis longtemps oubliés. Cette petite colonie était tout en émoi à l’intérieur comme à l’extérieur du fort. Les Cries et les Pieds-Noirs avaient fait la paix depuis quelque temps, et de grands campements des deux nations étaient établis & une ou deux journées du Fort. Il en venait des essaims continuels de visiteurs, tous désireux de profiter de la rare occasion que leur présentait une paix dont la durée était comme toujours très-problématique. Pour ces visites officielles que les membres d’une tribu faisaient & ceux de l’autre, les hommes se mettaient dans leur plus belle toilette et s’ornaient de leurs plus riches peintures. La parure d’un dandy parmi les Cries consistait en jambières et en couver-

  1. Le nom de Petit Fort nous semble bien être dû à une interprétation erronée de celui de fort Pitt… Quelle que soit la réputation des deux Pitt, il est permis de croire qu’elle n’est pas clairement comprise par les Peaux-Rouges ni per les métis. (Trad.)