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l’infamie et la démence de ce temps me permettent d’en révéler.

Maintenant, je peux chanter librement le cantique de l’heure ensoleillée des nuits de Dieu

Et, proclamant la sagesse des deux mondes qui furent ouverts à ma vue.

Parler, selon la mesure imposée par le compagnon de service

De la connaissance perdue de l’or et du sang.

J’ai vu. Celui qui a vu cesse de penser et de sentir. Il ne sait plus que décrire ce qu’il a vu.

Voici la clef du monde de lumière. De la magie des mots que j’assemble ici

L’or du monde sensible tire sa secrète valeur.

Car ce ne sont pas ses vertus physiques qui l’ont fait roi des esprits.

La vérité est cela par rapport à quoi l’Illimité est situé.

Mais la vérité ne fait pas mentir le langage sacré : car elle est aussi le soleil visible du monde substantiel, de l’univers immobile.

De ce soleil, l’or terrestre tire sa substance et sa couleur ; l’homme la lumière de sa connaissance.

Le langage retrouvé de la vérité n’a rien de nouveau à offrir. Il réveille seulement le souvenir dans la mémoire de l’homme qui prie.

Sens-tu se réveiller en toi le plus ancien de tes souvenirs ?

Je te révèle ici les origines saintes de ton amour de l’or.

La folie a soufflé sept fois sur le chandelier d’or de la connaissance.

Les mots du langage des Aaronites sont profanés par les enfants menteurs et les poètes ignorants