Dans une nuit de soleil, les paresseuses
Hèlent, les îles de jeunesse chantantes et voilées ! Le doux
Lourd murmure de deuil des guêpes de midi
Vole bas sur le vin et il y a de la folie
Dans le regard de la rosée sur les collines mes chères
Ombreuses. Dans l’obscurité religieuse les ronces
Ont saisi le sommeil par ses cheveux de fille. Jaune dans l’ombre
L’eau respire mal sous le ciel lourd et bas des myosotis.
Cet autre souffre aussi, blessé comme le roi
Du monde, au côté ; et de sa blessure d’arbre
S’écoule le plus pur désaltérant du cœur.
Et il y a l’oiseau de cristal qui dit mlî d’une gorge douce
Dans le vieux jasmin somnambule de l’enfance.
J’entrerai là en soulevant doucement l’arc-en-ciel
Et j’irai droit à l’arbre où l’épouse éternelle
Attend dans les vapeurs de la patrie. Et dans les feux du temps apparaîtront
Les archipels soudains, les galères sonnantes —
Paix, paix. Tout cela n’est plus. Tout cela n’est plus ici, mon fils Lémuel.
Les voix que tu entends ne viennent plus des choses.
Celle qui a longtemps vécu en toi obscure
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