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SYMPHONIE DE SEPTEMBRE

I

Soyez la bienvenue, vous qui venez à ma rencontre
Dans l’écho de mes propres pas, du fond du corridor obscur et froid du temps.
Soyez la bienvenue, solitude, ma mère.
Quand la joie marchait dans mon ombre, quand les oiseaux

Du rire se heurtaient aux miroirs de la nuit, quand les fleurs,
Quand les terribles fleurs de la jeune pitié étouffaient mon amour
Et quand la jalousie baissait la tête et se regardait dans le vin
Je pensais à vous, solitude, je pensais à vous, délaissée.

Vous m’avez nourri d’humble pain noir et de lait et de miel sauvage ;
Il était doux de manger dans votre main, comme le passereau,
Car je n’ai jamais eu, ô Nourrice, ni père ni mère
Et la folie et la froideur erraient sans but dans la maison.

Quelquefois, vous m’apparaissiez sous les traits d’une femme
Dans la belle clarté menteuse du sommeil. Votre robe

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