Page:Millevoye - Goffin, 1812.djvu/5

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Ils appellent… Tout garde un silence de mort.
Le salpêtre deux fois s’allume, éclate et gronde ;
Son bruit détonne au loin sous la terre profonde ;
C’est en vain : le bruit meurt, et l’espoir avec lui.
Déjà du second jour la dernière heure a fui ;
La nuit s’achève, et l’ombre a fait place à l’aurore.
On s’arrête, on écoute, on n’entend rien encore.

« Hélas ! les malheureux dans l’abîme plongés
Perdent aussi leur plainte et leurs cris prolongés :
Bientôt l’air que leur bouche avidement respire,
À leurs poumons brûlans ne pourra plus suffire.
Suffoqués des vapeurs de l’étroit souterrain,
Par la soif consumés, dévorés par la faim,
L’un cherche sous la voûte, aux bords de l’onde impure,
D’un cadavre récent l’effroyable pâture :
Du pic laborieux l’autre ronge le fer,
Ou du flanc des rochers aspire un sel amer :
D’autres, aux profondeurs de ce gouffre homicide,
En hurlant vont puiser une boisson fétide :
D’autres, muets, l’œil fixe, et les traits sans couleur,
Du flambeau qui décroît observent la pâleur ;
Et chacun, abjurant des travaux inutiles,
Disait : « S’il faut mourir, mourons du moins tranquilles ».