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ANTHOLOGIE DES HUMORISTES

Le président. — Quand il a été tondu, oui.

Fillard. — En lion et avec des manchettes. Pour lors, je dis à monsieur :

« Allons chez le commissaire ! »

Il m’envoie coucher et veut s’en aller ; je lui saute au collet, le monde s’amasse, des sergents de ville arrivent et nous mènent au poste. Voilà le chien qui nous suit en tortillant, remuant la queue, fier comme un coq ; il voulait entrer au poste avec nous, les agents lui fichent des coups de pieds pour le renvoyer ; nous entrons, et on le laisse à la porte ; nous nous expliquons, dont le brigadier dit à monsieur : « Voyous, ne nous la faites pas à la blague ; donnez quarante sous à cet homme ! »

Il refuse ; alors le brigadier dit aux deux sergents de ville de nous mener chez le commissaire de police. Nous sortons ; qu’est-ce que nous trouvons à la porte ? Le chien qui nous attendait et qui vient avec nous, toujours en frétillant, ce qui prouve bien qu’il est à monsieur, qui voulait le faire tondre à l’œil.

M. Boulabert. — Pas du tout ; la preuve, c’est que je l’ai chassé ; mais il se cramponnait à moi, il ne voulait pas me lâcher.

Le président. — Soit ! vous n’en avez pas moins voulu faire une mauvaise plaisanterie à ce malheureux.

M. Boulabert. — Aucunement. Il me demande si je veux qu’il le tonde en lion : ça ne me regardait pas ; il a fait ce qu’il a voulu.

Le président. — Allons, ne persistez pas dans votre mauvaise explication. Vous n’avez pas l’air d’un naïf ; donnez les deux francs à cet homme, plus les trois francs qu’il demande pour le dérangement que vous lui causez.

M. Boulabert. — Pardon, mais…

Le président. — Vous refusez ?