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semble exciter une animosité implacable, quand elle est pratiquée par des gens qui parlent anglais et qui se donnent pour une sorte de chrétiens. Personne ne peut désapprouver plus fortement que moi cette institution des Mormons : cela pour beaucoup de raisons, et entre autres parce que loin d’être appuyée sur le principe de liberté, elle est une infraction directe à ce principe, puisqu’elle ne fait que resserrer les chaînes d’une partie de la communauté, et dispenser l’autre partie de toute réciprocité d’obligations. Cependant on doit se rappeler que cette relation est aussi volontaire de la part des femmes qui nous en paraissent les victimes, que toute autre forme de l’institution matrimoniale ; et, si surprenant que puisse sembler le fait, il a son explication dans les idées et les habitudes générales du monde : on apprend aux femmes à regarder le mariage comme l’unique chose nécessaire, il est concevable dès lors que beaucoup d’entre elles préfèrent épouser un homme qui a plusieurs autres femmes à ne pas se marier du tout. On ne demande pas à d’autres pays de reconnaître de telles unions, ou de laisser une partie de leur territoire abandonner la loi nationale pour la doctrine des Mormons. Mais quand des dissidents ont concédé aux sentiments hostiles des autres beaucoup plus qu’on ne pouvait en toute justice l’exiger, quand ils ont quitté les pays qui ne pouvaient tolérer leurs doctrines et se sont établis