Page:Mill - La Liberté, trad Dupont-White, 1860.djvu/257

Cette page n’a pas encore été corrigée

Ne priera-t-elle pas d’une façon très-péremptoire ces hommes d’une piété si importune de s’occuper de leurs affaires ? C’est précisément ce qui devrait être dit à tout gouvernement ou à tout public qui a la prétention de priver tout le monde des plaisirs qu’il condamne. Mais si le principe de la prétention est admis, on ne peut faire d’objection raisonnable à ce que la majorité ou tout autre pouvoir dominant dans le pays l’applique selon ses vues ; et chacun doit être prêt à se conformer à l’idée d’une république chrétienne, telle que la comprenaient les premiers colons de la Nouvelle-Angleterre, si une secte religieuse comme la leur reprenait jamais possession du terrain perdu, ainsi qu’on l’a vu faire souvent à des religions qu’on croyait en décadence.

Supposons maintenant une autre éventualité qui a peut-être plus de chance de se réaliser que la dernière. Il y a, de l’aveu de chacun, une tendance puissante dans le monde moderne vers une constitution démocratique de la société, qu’elle soit accompagnée ou non par des institutions politiques populaires. On affirme que dans le pays où cette tendance prévaut le plus, qu’aux États-Unis, où existent la société et le gouvernement les plus démocratiques, le sentiment de la majorité à qui déplaît toute manière de vivre trop brillante ou trop dispendieuse pour qu’elle puisse espérer l’égaler, fait assez bien l’effet d’une loi somptuaire ; et il est, dit-on, maintes