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certains devoirs envers la société, quand la société ne prétend pas avoir le droit de leur imposer ces devoirs. Mais je ne puis admettre que la société n’ait pas d’autre moyen d’élever ses membres les plus faibles au niveau ordinaire de la conduite rationnelle, que d’attendre qu’ils aient agi d’une façon déraisonnable, et alors de les en punir, légalement ou moralement. La société a eu tout pouvoir sur eux pendant la première portion de leur existence, elle a eu toute la période de l’enfance et de la minorité pour tâcher de les rendre capables de se conduire raisonnablement pendant la vie. La génération présente est maîtresse et de l’éducation et de toute la destinée de la génération à venir : à la vérité, elle ne peut la rendre parfaitement sage et bonne, parce que ces deux qualités, sagesse et bonté, lui manquent à elle-même d’une façon lamentable ; et ses plus grands efforts ne sont pas les plus heureux dans beaucoup de cas individuels ; mais la génération présente est parfaitement capable de rendre, en somme, la génération future aussi bonne et un peu meilleure qu’elle-même.

Si la société laisse un grand nombre de ses membres grandir dans un état d’enfance prolongée, incapables d’être influencés par des considérations rationnelles à motifs lointains, c’est la société qui est à blâmer pour les conséquences. Armée non-seulement de tous les pouvoirs de l’éducation, mais encore