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élevés. Mais une personne, ou un certain nombre de personnes, n’a pas le droit de dire à un homme d’un âge mûr qu’il n’arrangera pas sa vie dans son intérêt, comme il lui convient. C’est lui-même que son bien-être touche le plus ; l’intérêt que peut y prendre un étranger n’est rien (à moins d’un vif attachement personnel) à côté de l’intérêt qu’il y prend lui-même ; la manière dont il intéresse la société (excepté quant à sa conduite envers les autres) est partielle et indirecte ; tandis que pour tout ce qui est de ses sentiments et de sa position, l’homme ou la femme la plus ordinaire sait infiniment mieux à quoi s’en tenir que n’importe qui.

L’intervention de la société pour diriger le jugement et les desseins d’un homme dans ce qui ne regarde que lui, se fonde toujours sur des présomptions générales : or ces présomptions peuvent être complétement fausses, fussent-elles justes, elles seront peut-être appliquées à tort dans des cas individuels par des personnes qui ne connaissent que la surface des faits. C’est pourquoi ce département des affaires humaines appartient en propre à l’individualité. Pour ce qui est de la conduite des hommes les uns envers les autres, l’observance des règles générales est nécessaire, afin que chacun sache ce qu’il doit attendre ; mais quant aux intérêts particuliers de chaque personne, la spontanéité individuelle a le droit de s’exercer librement. La société peut offrir et même