de caractère et de culture. En Europe, les individus, les classes, les nations ont été extrêmement dissemblables : ils se sont frayé une grande variété de voies conduisant chacune à quelque chose de précieux ; et quoiqu’à chaque époque ceux qui suivaient les différentes voies aient été intolérants les uns envers les autres, et eussent chacun regardé comme une excellente chose de pouvoir obliger tout le reste à suivre leur propre route, néanmoins leurs efforts réciproques pour empêcher leur développement ont eu rarement un succès permanent, et, chacun à leur tour, tous ont dû souffrir le bien qu’apportaient les autres. Selon moi, l’Europe doit uniquement à cette pluralité de voies son développement progressif et varié. Mais déjà elle commence à posséder cet avantage à un degré beaucoup moins considérable. Elle marche décidément vers l’idéal chinois de rendre tout le monde pareil. M. de Tocqueville, dans son dernier et important ouvrage, remarque combien les Français d’aujourd’hui se ressemblent plus que ne le faisaient ceux même de la dernière génération. On pourrait faire la même remarque sur les Anglais, avec beaucoup plus de raison encore.
Dans un passage déjà cité, Guillaume de Humboldt désigna deux choses comme des conditions nécessaires du développement humain, parce qu’elles sont nécessaires pour rendre les hommes dissemblables :